Préface du « Sermon sur la Montagne »

15792104Le Père Monier et le Sermon sur la montagne.

Dans l’homélie qu’il prononça à ses funérailles le 30 mars 1977, le Père Varillon rappelait ce que fut le message apporté aux jeunes dans les années 1930 par le Père Monier, un message de libération « bouleversant », après des siècles de catholicisme janséniste, carcan étouffant obsédé par les interdits, le péché et l’enfer :

C’est d’abord dans le creux de l’oreille que j’entendis pour la première fois de façon nette, nette à vous couper le souffle, et comme s’il s’agissait de deux membres indissociables d’une même phrase, d’une part le mot de Saint Jean : « Dieu est amour », d’autre part celui de Saint Paul : « Vous avez été appelés à la liberté. » J’avais dix-huit ans. Dans une petite chambre de la Maison des étudiants catholiques, sur la rive gauche du Rhône, le Père Monier articulait ces mots sur le ton de la confidence, comme s’il y avait péril à être entendu au-delà de notre petit cercle d’étudiants ; mais l’éclair de malice qui brillait dans ses yeux signifiait que bientôt (il suffisait d’un peu de patience) il lui serait possible de les crier sur les toits. 

Jésus-Christ  est venu libérer les hommes de la Loi d’abord du péché ensuite ! aimait-il à scander inlassablement, avec ce goût malicieux du paradoxe dont il se servait pour secouer les esprits. Ce message de liberté et d’amour auquel il consacra sa vie, le Père le mettait volontiers dans la bouche du Christ lui-même :

Je viens libéré votre liberté empoisonnée de tant de liens ! Je vous libère du déterminisme en vous révélant que tout est amour. Je vous libère de la souffrance en vous aidant à en faire un moyen d’exprimer l’amour. Je vous donnerai ma liberté de fils dans la maison ; je vous libérerai de toute loi extérieure à vous. Avec moi, vous pourrez jouir de la suprême indépendance, celle de l’amour.

Tel a été toute sa vie le message du Père Monier, ce grand mystique passionné du Christ, ce savant théologien, cet humaniste fin lettré, qui fut également un passionné de l’homme et de son avenir. Libre, il le fut lui-même dans ses choix sans concession, dans sa parole pleine de vie, si peu conventionnelle, dans son abandon absolu aux moindres appels de son Christ bien-aimé.

Ce Sermon sur la montagne, le Père l’a souvent « parlé » avant de l’écrire, en des phrases vives, lapidaires. Il y montre la vision divine de l’homme que révèle le Christ ; à cet homme « vu » par Dieu, enfant de Dieu, le Fils Premier-né adresse amoureusement ici un concentré d’enseignement divin. Au coeur du Sermon, la prière Pater, emblème de l’attitude filiale que propose Jésus à l’homme, celle même qui fut la sienne devant ce Père dont Il fait « notre » Père. Il s’agit pour l’homme de relever cette filiation, d’aller puise à la source le courant de grâce à transmettre, de se faire « levain », « sel » capables de donner goût à la vie ; de modeler le coeur humain sur le Coeur divin qui toujours donne, se donne, pardonne. Car, telle est la conclusion du Sermon, l’homme, héritier divin, est appelé à devenir semblable à Dieu, parfait (« miséricordieux », dit Luc) comme son Père céleste est parfait.

M.F. Reynes

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