[Extraits du Sermon sur la montagne, éditions du Signe 2005]
[Le regard du Christ] est plein d’estime, comme le regard d’un Père qui sait la dignité de son enfant. Cette estime et ce respect (cum magna reverentia)(1) imprègnent tout le Sermon.
Cependant, cet enfant n’est qu’un enfant, une créature. Il reçoit tout : son être, sa vie. De soi, il n’est pas ; il est créé, fait de rien… Aussi la loi de son être, de sa vie est-elle la loi de réceptivité. C’est la loi de tout vivant : le vivant reçoit tous les éléments dont il se fait, dont il fait son fruit.
[Jésus] sait que l’homme a un appétit de bonheur qui est la vie épanouie. Tout ce qu’il fait est vers ce qu’il croit devoir le rendre heureux. Dieu veut le bonheur de l’homme, puisque Il l’a fait vivant. Jésus veut donner joie totale et vie abondante ; Il est venu pour cela.
C’est dès maintenant que le pauvre est heureux s’il accepte sa pauvreté et s’il ouvre du côté de Dieu son Père ses mains vides.

Cependant ce Règne de Dieu, cette création vitale, ne s’établit que sur des âmes dociles, disponibles, réceptives, malléables. Il est don, grâce comme la lumière pour les fleurs.
Dieu Exige avant tout l’indigence, le désir, la soif, la patience courageuse, la bonté, la douceur, la pureté, le sentiment plus ou moins douloureusement senti de son insuffisance, de l’insuffisance du monde à satisfaire un être fait pour l’infini.
La suffisance est le grand mal de l’homme : elle arrête la vie, en lui coupant les vivres.
Ces Béatitudes sont au nombre de huit (chiffre messianique). Elle forment une octave dont les notes se composent merveilleusement en une tonalité unique. La pauvreté consentie, la peine, la douceur, la faim et la soif, la pureté du regard et du cœur, la miséricorde et la patience sont les variantes d’un même thème.
P. Monier