Prier c’est s’exprimer face à face avec Dieu.
Dieu aime qu’on aille le trouver et qu’on lui dise : « J’en ai marre, j’en ai ultra-marre… je n’en peux plus. »

Il faut à tout prix que nous nous exprimions.

Exprimer, cela veut dire : presser au dehors, c’est nécessaire, sans cela nous risquerions d’étouffer. Les Sœurs qui sont ici en retraite s’étonnent que je les fasse enrager. C’est parce que je les connais : elles ne peuvent pas s’exprimer dans leur couvent ! Il faut être très bien dans les couvents, il faut être très conforme au modèle. Tandis qu’ici on les met à l’aise ; elles sont elles-mêmes. Avouez qu’elles sont bien mieux, hein?

La prière de Jésus c’est être à l’aise avec lui et lui dire : « Au moins avec vous, Seigneur, je puis être vrai. »

Un voyou que j’ai connu à Montreuil vient un jour me trouver.
– On m’a dit de faire oraison. Comment qu’ça s’goupille c’t’affaire là?
– Tu veux savoir comment je fais oraison? Je vais dehors ou à la chapelle. Si c’est à la chapelle je dis au Bon Dieu, à Jésus-Christ : « Écoutez, vous aimez voir un pauvre type… me voilà! »
Quelques jours après , je trouve mon grand type pâle, debout…
– Tu n’es pas malade? Comment ça va vieux?
– Ça va bien.
– D’où tu viens?
– De la chapelle.
– Qu’as-tu fait?
– J’ai fait comme vous, j’ai dit au Christ : « Tu aimes voir un pauvre voyou, ben en v’la un… » Au bout d’un moment, je m’embêtais, j’avais envie de m’en aller. Puis je le regarde et je me dis : « Non, reste encore, ça Lui fait trop plaisir de te voir. »

Voilà la prière.

Mais il vous faut savoir sa tactique : c’est de ne jamais faire les choses lui-même directement, c’est de vous les faire faire vous-même.

Il dit : « Vous avez demandez un œuf à votre Père? Il est donné, c’est entendu. Seulement, Il vous aime beaucoup, Il ne vous donnera pas un œuf tout cuit ni même de le trouver dans votre poche. Il vous dira : « Mon petit, c’est fait, je t’accorde ta demande, mais à cause de toi, pour que tu puisses vraiment te former et pour ton bien, cherche-le. »

« Tu désires la patience? Eh bien je te la donne. Je te donne la force pour être patient et tu vas trouver tous les éléments possibles pour exercer ta patience. Tu seras impatienté beaucoup pour pouvoir devenir patient. »
Sa tactique n’est pas de vous donner la patience toute faite, il vous donne la force, il vous donne le désir.

C’est pour cela que je pose toujours la question, si vous êtes en état de grâce : « Vous regrettez de ne pas être mieux? -Oui. – Vous désirez être mieux? -Oui. -Alors! fichez moi la paix : le Bon Dieu est avec vous, vous vous débrouillerez ! »

Je suis bien tranquille sur cette personne : elle regrette et elle désire.

P.M.